REGLEMENT N°2005-05 DU 15 DECEMBRE 2005 RELATIF
A LA PREVENTION ET A LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT D'ARGENT
ET LE FINANCEMENT DU TERRORISME
Le gouverneur de la Banque d'Algérie,
- Vu l'Ordonnance n°75-59 du 26 septembre 1975, modifiée et complétée, portant code de
commerce ;
- Vu l'ordonnance n° 03-11 du 27 Joumada Ethania 1424 correspondant au 26 août 2003
relative à la monnaie et au crédit, notamment ses articles 56 et 57 ;
- Vu la Loi n°05-01 du 27 Dhou El Hidja 1425 correspondant au 6 février 2005 relative à la
prévention et à la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme ;
- Vu le décret exécutif n° 02-127 du 24 Moharram 1423 correspondant au 7 avril 2002
portant création, organisation et fonctionnement de la cellule de traitement du
renseignement financier (CTRF) ;
- Vu le décret exécutif n° 05-442 du 12 Chaoual 1426 correspondant au 14 novembre 2005
fixant le seuil applicable aux paiements devant être effectués par les moyens de paiement à
travers les circuits bancaires et financiers ;
- Vu le décret présidentiel du 10 Rabie El Aouel 1422 correspondant au 2 juin 2001 portant
nomination du Gouverneur et des Vice-Gouverneurs de la Banque d'Algérie ;
-Vu le décret présidentiel du 10 Rabie El Aouel 1422 correspondant au 2 juin 2001 portant
nomination des membres du Conseil d'administration de la Banque d'Algérie ;
- Vu les délibérations du conseil de la monnaie et du crédit en date du 15 décembre 2005 ;
Promulgue le règlement dont la teneur suit :
Article 1er : Les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie poste doivent, en application de la Loi n°05-01 du 27 Dhou El Hidja 1425
correspondant au 6 février 2005 relative à la prévention et à la lutte contre le
blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, tels que définis dans ses articles 2
et 3, faire preuve de vigilance. Ils doivent, à cet effet, disposer d'un programme écrit de
prévention, de détection et de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du
terrorisme. Ce programme doit comprendre, notamment :
- des procédures,
- des contrôles,
- une méthodologie de diligence en ce qui concerne la connaissance de la clientèle,
- des formations appropriées à l'attention de leur personnel,
- un dispositif de relations (correspondant et déclarations de soupçon) avec la
cellule de traitement du renseignement financier (CTRF).
Ce programme s'intègre dans le dispositif de contrôle interne des banques et
établissements financiers et rapport en est fait annuellement à la commission bancaire.
TITRE I : CONNAISSANCE DE LA CLIENTELE ET DES OPERATIONS
Article 2 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-
Poste doivent, dans le but d'éviter de s'exposer à des risques sérieux liés à leur clientèle
et à leurs contreparties, veiller à l'existence de normes internes « connaissance de la
clientèle » et à leur adéquation en permanence.
BANK OF ALGERIA
Les mesures de protection liées à la connaissance de la clientèle dépassent le cadre
d'une simple opération d'ouverture et de tenue de compte. Elles exigent de la part des
banques, des établissements financiers et des services financiers d'Algérie-Poste un
devoir de diligence rigoureux à l'égard des comptes et opérations pouvant être à risques
et une surveillance vigilante des activités et opérations pouvant être suspectes.
Article 3 : Les normes connaissance de la clientèle doivent prendre en compte les
éléments essentiels de la gestion des risques et des procédures de contrôle,
notamment :
1. la politique d'acceptation des nouveaux clients ;
2. l'identification de la clientèle et le suivi des mouvements et opérations ;
3. la surveillance continue des comptes à risques.
Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste
doivent connaître l'identité et l'adresse de leurs clients et surveiller les mouvements de
comptes pour déceler les types d'opérations et les transactions atypiques et/ou
inhabituelles et leur justification économique pour un client précis ou une catégorie de
comptes.
Article 4 : La procédure d'identification de la clientèle intervient lors de l'établissement
de la relation d'affaires. Aux fins du présent règlement, on désigne notamment par le
terme « client » :
- toute personne ou entité titulaire d'un compte auprès de la banque ou au nom de
laquelle un compte est ouvert (propriétaire effectif du compte) ;
- les bénéficiaires de transactions effectuées par des intermédiaires
professionnels ;
- les clients occasionnels ;
- les mandataires et les agents agissant pour le compte d'autrui ;
- toute personne ou entité associée à une transaction financière effectuée par
l'intermédiaire d'une banque, d'un établissement financier ou les services financiers
d'Algérie-Poste.
Article 5 : La vérification de l'identité d'une personne physique se fait par la
présentation d'un document officiel original en cours de validité et comportant une
photographie. Il est important de recueillir les informations sur la filiation de l'intéressé.
La vérification de l'identité d'une personne morale, y compris tout type d'association et
autres organisations, est effectuée par la présentation d'un original de ses statuts et de
tout document établissant qu'elle est légalement enregistrée ou agréée et qu'elle a une
existence et une adresse réelles au moment de l'identification.
La vérification de l'adresse se fait par la présentation d'un document officiel en
établissant la preuve et par le retour d'un accusé de réception retourné d'une
correspondance (lettre d'avis d'ouverture de compte ou de courtoisie) transmise à
l'adresse déclarée.
Les mandataires et les agents agissant pour le compte d'autrui doivent présenter, outre
les documents prévus ci-dessus, les pouvoirs ainsi que les documents prouvant l'identité
et l'adresse des propriétaires effectifs des fonds.
Une copie des éléments de preuve d'identité et d'adresse est conservée.
Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste
doivent privilégier dans le cadre de la relation avec leur clientèle des contacts
périodiques.
Si après l'ouverture d'un compte, apparaissent des problèmes de vérification et de mise
à jour, les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-
Poste doivent clôturer le compte, en informer la cellule de traitement du renseignement
financier et la commission bancaire, et restituer le solde sauf stipulation contraire d'une
autorité compétente.
Article 6 : Pour s'assurer que les données qu'ils détiennent sont à jour, les banques, les
établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste doivent les
actualiser annuellement, et au moins à l'occasion d'une transaction importante, d'une
modification substantielle des normes de documentation sur la clientèle ou d'un
changement important dans le mode de gestion du compte.
Toutefois, si une banque, un établissement financier ou les services financiers d'Algérie-
Poste réalisent à un moment donné, qu'ils manquent d'informations au sujet d'un client
existant, ils devront prendre des mesures pour obtenir le plus tôt possible tous les
renseignements nécessaires.
Article 7 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-
Poste doivent, à la discrétion de leur direction générale, obtenir de tout nouveau client,
personne potentiellement exposée, suffisamment de renseignements et prendre les
dispositions de prudence adéquates dans la gestion de cette relation.
TITRE II : CONSERVATION DES DOCUMENTS
Article 8 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-
Poste doivent conserver durant une période de cinq (5) ans, après la clôture des
comptes et/ou la cessation de la relation d'affaires :
- les documents relatifs à l'identité et à l'adresse des clients,
- les documents relatifs aux opérations effectuées après l'exécution de l'opération.
Ces documents sont tenus à la disposition des autorités compétentes.
Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste
sont tenus d'élaborer des procédures, à l'attention de leurs structures opérationnelles,
précisant quelles sont les données à conserver sur l'identification de la clientèle, sur les
transactions individuelles et sur la durée légale et réglementaire de conservation.
TITRE III : BANQUES CORRESPONDANTES
Article 9 : Les banques et les établissements financiers, intermédiaires agréés doivent
réunir suffisamment d'informations sur leurs correspondants bancaires. L'intermédiaire
agréé doit établir des relations de correspondant avec des établissements bancaires
étrangers à la condition :
- que la reddition de leurs comptes soit certifiée ;
- qu'elles soient soumises à un contrôle par les autorités compétentes ;
- et qu'elles collaborent, dans le cadre d'un dispositif national de lutte contre le
blanchiment d'argent et du financement du terrorisme.
Les conventions de comptes correspondants doivent être actualisées, pour intégrer les
obligations prévues ci-dessus.
TITRE IV : SYSTÈMES D'ALERTE
Article 10 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie-Poste sont tenus de disposer de systèmes permettant, pour tous les comptes,
de déceler les activités ayant un caractère inhabituel ou suspect.
Les types d'opérations de nature à éveiller les soupçons doivent faire l'objet d'une
déclaration de soupçon qui sera transmise à la cellule de traitement du renseignement
financier. Il s'agit, notamment, des opérations :
- qui ne semblent avoir aucune justification économique ou commerciale
perceptible,
- qui présentent des mouvements de fonds démesurés par rapport au solde du
compte,
- qui portent sur des montants, notamment en liquide sans relation avec les
transactions habituelles ou concevables du client,
- qui sont d'une complexité inhabituelle ou injustifiée,
- qui ne paraissent pas avoir d'objet licite.
Pour ces opérations, les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie-Poste sont tenus de se renseigner sur l'origine et la destination des fonds ainsi
que sur l'objet de l'opération et l'identité des intervenants.
Outre la déclaration de soupçon, un rapport confidentiel est établi et conservé sans
préjudice des articles 15 à 22 de la Loi n°05-01 du 6 février 2005, susvisée.
TITRE V : DECLARATION DE SOUPÇON
Article 11 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie-Poste sont soumis à l'obligation légale de déclaration de soupçon dans les
formes réglementaires et en requérir accusé de réception.
Les banques et les établissements financiers doivent déclarer à la cellule du traitement
du renseignement financier (CTRF), toute opération lorsqu'elle porte sur des fonds
paraissant provenir d'un crime ou d'un délit notamment le crime organisé et le trafic de
stupéfiants et de substances psychotropes ou en relation avec le financement du
terrorisme.
Les déclarations de soupçon doivent être faites dès qu'il y a soupçon, même s'il a été
impossible de surseoir à l'exécution des opérations ou postérieurement à leur réalisation.
Tout élément tendant à renforcer le soupçon ou à l'infirmer doit être communiqué sans
délai à CTRF.
La déclaration de soupçon doit être faite conformément au modèle réglementaire.
Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste sont
tenus au strict respect des mesures conservatoires édictées par l'article 18 de la Loi
relative à la prévention et la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du
terrorisme. Ils doivent veiller à son application.
Article 12 : Les procédures de déclaration des opérations suspectes doivent être
clairement précisées par écrit par chaque banque, établissement financier et les services
financiers d'Algérie-Poste et portées à la connaissance de leur personnel. Ces procédures
internes doivent, en outre, déterminer les conditions de déclaration de soupçon à la
cellule de traitement du renseignement financier.
Article 13 : La déclaration de soupçon est à destination exclusive de la cellule de
traitement du renseignement financier. La déclaration de soupçon et les suites qui lui
sont réservées entrent dans le cadre du secret professionnel et ne peuvent être portées
à la connaissance du client ou du bénéficiaire des opérations.
Article 14 : En application de la loi, le secret bancaire n'est pas opposable à la cellule de
traitement du renseignement financier.
Article 15 : La loi protège les déclarants ayant procédé de bonne foi, de toute poursuite
et de responsabilité administrative, civile et pénale. Cette disposition doit être portée à la
connaissance du personnel.
TITRE VI : VIREMENTS ÉLECTRONIQUES ET MISE A DISPOSITION
DE FONDS
Article 16 : Dans le cadre des virements électroniques, quel que soit le support utilisé
(SWIFT, ARTS, ATCI etc...) et/ou de mise à disposition de fonds, les banques, les
établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste veillent à
l'identification précise du donneur d'ordre et du bénéficiaire ainsi que de leur adresse.
TITRE VII : INFORMATION ET FORMATION
Article 17 : Chaque banque, établissement financier et les services financiers d'Algérie-
Poste doivent mettre en place un programme permanent de formation préparant
convenablement son personnel à la connaissance des dispositifs de lutte contre le
blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Le calendrier et le contenu des
séances organisées devront être adaptés aux nécessités spécifiques de l'établissement.
Article 18 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie-Poste doivent habiliter au moins un cadre supérieur responsable de la
conformité en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du
terrorisme, comme correspondant de la cellule de traitement du renseignement financier
et chargé de veiller au respect de leurs politiques et procédures en matière de lutte
contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.
Les banques, les établissements financiers et les services financiers d'Algérie-Poste
s'assurent que les procédures sont communiquées à tout le personnel et permettent à
chaque agent de rapporter toute opération suspecte au responsable de la conformité en
matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Un
rapport annuel en est fait à la commission bancaire.
Article 19 : Les banques, les établissements financiers et les services financiers
d'Algérie-Poste doivent définir dans un document les critères de déontologie et de
professionnalisme, en matière de déclarations. Ce document est obligatoirement porté à
la connaissance de tout leur personnel.
TITRE VIII : ROLE DES ORGANES DE CONTROLE EXTERNE DES BANQUES ET DES
ETABLISSEMENTS FINANCIERS
Article 20 : Les commissaires aux comptes évaluent la conformité des dispositifs
internes de prévention et de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du
terrorisme, des banques et établissements financiers agréés, par référence aux pratiques
normatives et de prudence en vigueur. Un rapport annuel en est fait à la commission
bancaire.
Article 21 : La commission bancaire veille à ce que les banques et les établissement
financiers disposent de politiques, pratiques et procédures appropriées, notamment de
critères stricts de connaissance de la clientèle et de ses opérations, de la détection
et surveillance ainsi que de la déclaration de soupçon, assurant un haut niveau d'éthique
et de professionnalisme dans le secteur bancaire.
Elle doit s'enquérir de l'existence du rapport visé à l'article 10 du présent règlement.
En cas de défaillance, une procédure disciplinaire pourra être engagée par la commission
bancaire.
Article 22 : Les inspecteurs de la banque d'Algérie, mandatés par la commission
bancaire et agissant dans le cadre du contrôle sur place ou sur pièces, transmettent
immédiatement un rapport, sous couvert de la hiérarchie, à la cellule de traitement du
renseignement financier dès qu'ils décèlent une opération présentant les caractéristiques
citées à l'article 10 du présent règlement.
Article 23 : Les bureaux de change agréés doivent adopter des mesures d'identification
de leur clientèle. Ils sont soumis à l'obligation de déclaration de soupçon à la cellule de
traitement du renseignement financier.
Article 24 : Le présent règlement sera publié au Journal officiel de la République
algérienne démocratique et populaire.
Le Gouverneur
Mohammed LAKSACI |